Communiqué de presse : le cannabisme passif ne doit pas être punissable

Depuis 1977, de nombreuses études scientifiques ont démontré que l’inhalation de fumée de cannabis par un sujet passif (c’est-à-dire non-fumeur) est décelable par des tests sanguin et urinaire. Ces tests sont actuellement utilisés par les forces de l’ordre et un résultat positif peut être interprété à tort comme preuve formelle de consommation.

Des non-consommateurs risquent donc d’être condamnés par la justice ou devoir payer une amende ou se voir licenciés de leur emploi ou être exclu de leur école, etc… alors qu’ils n’ont pas fumé de cannabis. C’est évidemment totalement injuste !

Pour ces raisons, Infor-Drogues insiste sur la nécessité de revoir l’utilisation, judiciaire ou autre, de ces tests. La police et les autres instances répressives devraient éviter des injustices et offriraient une sécurité juridique bien plus solide en ne se basant que sur la détention effective d’une quantité réelle de cannabis. Ce qui serait, soit dit au passage, beaucoup plus en accord avec la loi qui ne punit pas l’usage mais bien la détention.

La Ministre de la Justice qui a annoncé vouloir éviter toute confusion à l’avenir, se dit prête à revoir, dans cette optique, la circulaire sur la détention de cannabis et Infor-Drogues la félicite. Nous l’encourageons aussi à demander aux forces de l’ordre de ne plus utiliser des tests qui peuvent semer le doute et aux parquets de ne plus les considérer comme des preuves formelles de consommation.

L’INHALATION PASSIVE DE CANNABIS PEUT DONNER UN RÉSULTAT POSITIF DANS LES TESTS SANGUINS ET URINAIRES : résumé de quelques études scientifiques

La littérature relatait déjà en 1977 (Zeidenberg et al.) que l’inhalation passive de marijuana pouvait induire des symptômes tels que nausées, tachycardie et conjonctivite. Dans cette expérience, les sujets contrôles (non fumeurs) montraient des résultats positifs à un contrôle urinaire au cannabis. Ces auteurs ont ainsi créé le concept de « contact high » pour expliquer ce phénomène et attiraient également l’attention sur les dispositions légales à prendre au cas où la marijuana deviendrait légale.

En 1983, l’équipe de Perez-Reyes et Masson réalise une série d’études démontrant que l’inhalation passive de fumée de marijuana peut être décelable tant dans le plasma sanguin que dans des échantillons d’urine. Dans ces expériences, les sujets inhalaient passivement la fumée de quatre cigarettes de marijuana contenant un total de 104,8 mg de THC (delat-9-terahydrocannabinol) et ce durant 60 minutes. Les concentrations plasmatiques de THC atteignaient leurs « steady state » (l’effet plateau) avec une concentration de 2,2 ng/ml après seulement 20 minutes d’exposition passive. Les auteurs précisent également que la quantité inhalée étaient estimée à 3,2 microgrammes/minutes. Les concentrations de THC ont été vérifiées avec d’autres méthode de mesure comme l’analyse GC/MS. Les échantillons d’urine étaient prélevés 24 heures après l’inhalation et montraient une valeur proche de 20 ng/ml.

Dans une autre expérience (Law et al., 1984), 6 volontaires ont fumé chacun une cigarette de marijuana (17,1 mg de THC) dans une pièce non aérée. Quatre autres personnes ont inhalé passivement la fumée et sont restées dans la pièce durant 3 heures. Un test sanguin chez les fumeurs passifs donnait un résultat négatif au cannabis 3 heures après l’exposition alors que les tests urinaires étaient tous positifs 6 heures après l’exposition (avec des valeurs = 6,8 ng/ml). Morland et al. (1985) répliquent cette expérience mais cette fois-ci dans une voiture. Cinq volontaires n’ayant jamais fumé de cannabis ont été exposé pendant 30 minutes à de la fumée de cannabis (produite par d’autres sujets préalablement par des cigarettes de marijuana et de hashish) et ce dans une petite voiture, vitres fermées. Un test sanguin fait directement après l’exposition donne un résultat positif autour de 1,3 et 6,3 ng/ml. Ensuite, 4 des volontaires avaient des concentrations = 13 ng/ml. Les tests urinaires étaient également positifs avec des valeurs entre 13 et 20 ng/ml. Les auteurs concluent que la détection de THC (ou d’autres cannabinoïdes) n’est pas une preuve formelle d’un usage actif de cannabis.

Plus tard, d’autres études montrent des résultats semblables tout en apportant des précisions supplémentaires. Magerl H et al. (1987) confirment que la présence de cannabinoïdes dans les urines peuvent résulter d’une inhalation passive de marijuana ou de hashish. Ils précisent que tout dépend de l’intensité de l’exposition. Dans des conditions extrêmes, des valeurs allant jusqu’à 40 à 50 ng/ml peuvent être détectées. Cone et al (1987) précisent dans une expérience semblable que le niveau d’aération des pièces durant l’inhalation passive de cannabis apparaît comme le facteur le plus décisif dans la détection de THC chez les fumeurs passifs.

Enfin, l’étude la plus récente (Skopp G et Potsch, 2001) rappelle qu’il est urgent d’approfondir la recherche sur la pharmacocinétique de la fumée de cannabis car la distinction entre inhalation passive et active peut poser de sérieux problèmes.

Références :

1. Cone EJ, Johnson RE, Darwin WD, Yousefnejad D, Mell LD, Paul BD, Mitchell (1987) : Passive inhalation of marijuana smoke: urinalysis and room air levels of delta-9-tetrahydrocannabinol. J Anal Toxicol;11(3):89-96.
2. Law B, Mason PA, Moffat AC, King LJ, Marks V (1984) : Passive inhalation of cannabis smoke. J Pharm Pharmacol;36(9):578-81.
3. Magerl H, Wiegand C, Schulz E (1987): Cannabinoid intake by passive smoking Arch Kriminol 1987 ;179(1-2):31-7
4. Mason AP, Perez-Reyes M, McBay AJ, Foltz RL (1983) : Cannabinoid concentrations in plasma after passive inhalation of marijuana smoke. J Anal Toxicol;7(4):172.
5. Morland J, Bugge A, Skuterud B, Steen A, Wethe GH, Kjeldsen T (1985): Cannabinoids in blood and urine after passive inhalation of Cannabis smoke. J Forensic Sci;30(4):997-1002.
6. Perez-Reyes M, Di Guiseppi S, Mason AP, Davis KH.(1983) : Passive inhalation of marihuana smoke and urinary excretion of cannabinoids. Clin Pharmacol Ther;34(1):36-41.
7. Skopp G, Potsch L.(2001) : Passive exposure in detection of low blood and urine cannabinoid concentrations]. Arch Kriminol;207(5-6):137-47.
8. Zeidenberg P, Bourdon R, Nahas GG (1977). : Marijuana intoxication by passive inhalation: documentation by detection of urinary metabolites. Am J Psychiatry;134(1): 76-7.

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