Deux ou trois choses à propos du binge drinking

Ce phénomène semble très récent, en tout cas en Belgique. Ainsi, le journal d’information Le Soir (édition papier et édition internet) ne le fait apparaître pour la première fois qu’en 2005 pour décrire une situation britannique. La deuxième occurrence arrive en mai 2006 dans le « Swarado » et pose la question de manière directe aux jeunes « le binge drinking vous connaissez ? ». Et, c’est surtout à partir du début de l’année 2007 qu’un grand nombre d’articles reprenant ce concept paraissent.

« Ce phénomène existe, il progresse et c’est inquiétant». Tel est le message que nous ressassent les médias à l’unisson. Le coté dramatique est mis en avant, car ce phénomène concernerait surtout les jeunes. Mais, au-delà d’affirmations toutes faites ou de témoignages dont rien ne prouve ni la véracité ni la représentativité, qu’en est-il réellement de ce fameux phénomène ?

Qu’est-ce que le binge drinking ?

Dans la définition la plus communément acceptée, la notion de binge drinking correspond à la « consommation de 5 verres ou plus pour les hommes et 4 verres ou plus pour les femmes en une seule occasion », selon l’IREB (Institut de REcherches scientifiques sur les Boissons, France).

Le terme «occasion» n’est pas précisément défini. Il peut s’agir d’un épisode bref tout aussi bien que d’une soirée, d’un repas ou encore d’une nuit en boîte, donc d’une durée assez longue (plusieurs heures).

La définition de l’IREB correspond aux seuils de consommation les moins élevés parmi d’autres propositions de définitions existantes. En effet, outre la définition retenue, il existe d’autres seuils (huit consommations ou plus, 7 pour les femmes et 10 pour les hommes, une fourchette de 6-12, etc.). En fait, l’IREB reprend et avalise la définition nord-américaine. Cette définition reflète la culture américaine par rapport à l’alcool qui est fort différente (pensons à l’épisode de la prohibition de l’alcool) de la nôtre. Par exemple, aux USA l’alcool est interdit aux moins de 21 ans. Regrettons donc, au passage, qu’un phénomène aussi « culturel » que le rapport entre une société et l’alcool soit décrit et documenté sur base d’une définition extérieure à notre culture.

Un deuxième élément d’information découle du premier point : il s’agit de signaler que si la définition retenue englobe les consommations en partant du seuil le plus bas, c’est donc celle qui englobera le plus de consommateurs d’alcool. Logique.

Par ailleurs, les recommandations de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) préconisent « pour une consommation ponctuelle à moindre risque de ne pas boire plus de 4 verres standards en une seule occasion ». Dès lors, entre une consommation « à moindre risque » et le « binge drinking » il n’y a qu’un verre de plus par occasion… Imaginons une enquête où les répondants se trompent légèrement, en parlant de leurs consommations passées : ils se rappelleraient avoir bu 4 verres au lieu de 5 (ou l’inverse) : la conclusion pourrait être « tout le monde consomme de l’alcool à moindre risque » ou « tout le monde consomme de l’alcool en binge drinking ». La différence de dramatisation entre les deux conclusions est énorme mais elle ne repose que sur une très légère différence, de plus fort subjective.

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