Archive de l’étiquette consommation

[Dans la presse] « La consommation n’est pas le problème […] » (Le Vif)

« La consommation n’est pas le problème, elle est la solution à un problème »

Le journal Le Vif consacre un article de trois pages aux actions et à la vision de notre équipe d’accompagnement de professionnels. En effet, de nombreuses équipes et institutions se retrouvent démunies lorsqu’une partie de leur public consomme des drogues légales ou illégales, ou adopte des comportements potentiellement addictifs. Faut-il parler ? Interdire ? Sanctionner ? Expulser ? Les solutions sont souvent difficiles à trouver, car elles sont centrées sur l’idée que le produit ou le comportement est un problème. En réalité, il est une solution pour la personne qui y a recours.

La dépendance, selon Infor-Drogues, c’est donc « devoir toujours passer par une même pratique en cas de situation difficile émotionnellement. Ne pas avoir d’autre solution que consommer un produit ou adopter un comportement. On aura beau jeu de rétorquer « moi aussi j’ai des problèmes et je n’ai pas pour autant besoin de boire, de fumer ou de sniffer », très bien, tant mieux et bravo. Mais nous sommes tous différents. Et ceux qui ne savent pas gérer leurs émotions adoptent par ailleurs des moyens très différents pour les y aider : drogues, sport, méditation, yoga, nettoyer son intérieur, etc. Pénaliser ou punir ceux qui ne savent pas le faire autrement qu’en consommant une drogue ne servira pas à ce qu’ils n’en aient plus besoin, au contraire ! »

Dès lors la réflexion à laquelle pousse l’asbl se déplace de l’axe « que faire pour qu’il ne consomme plus en nos murs ? » à l’axe « pourquoi consomme-t-il en nos murs ?« . Elle invite l’institution à se pencher sur ses propres règles, peut-être déclencheuses de consommations […] »

Des bénéficiaires satisfaits

Une approche qui semble satisfaire les institutions qui font appel à nous. L’article donne en effet la parole à certaines institutions que notre équipe a accompagnées. L’occasion pour elles d’expliquer en quoi Infor-Drogues les a aidées à changer de regard sur leur problématique, et à retrouver du pouvoir d’agir sur leur situation.

Pour consulter cet article dans son intégralité, cliquez sur ce lien.

 

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Chers États prohibitionnistes, vous avez du sang sur les mains

Chers États prohibitionnistes, vous avez du sang sur les mains« Chers consommateurs de cocaïne, vous avez du sang sur les mains »[1], « Les consommateurs doivent savoir que notre sécurité est en danger par leur utilisation. Ils doivent vraiment se regarder dans le miroir »[2]. A entendre certaines personnalités politiques et judiciaires, les consommateur·rices de cocaïne sont les seuls et uniques responsables de l’existence et la violence des réseaux criminels auprès desquels iels se fournissent. Ce n’est pourtant pas la consommation de drogues illégales qui a fait naitre et prospérer le marché noir et ses entrepreneurs. Ceux qui ont mis en place les réseaux criminels qui produisent et distribuent la cocaïne, ce sont les États qui mettent en œuvre les politiques prohibitionnistes et la « guerre contre les drogues[3]».

Or, si les drogues – qu’elles soient légales comme le tabac ou illégales comme la cocaïne – continuent d’être consommées malgré les risques judiciaires et/ou de santé, c’est parce que ces produits remplissent pour leurs utilisateurs des fonctions essentielles. Dans le cas des utilisateur·rices de cocaïne, perçu·es comme des fêtard·es irresponsables et égoïstes[4], la ligne téléphonique d’Infor-Drogues[5], lorsqu’elle est sollicitée, découvre en réalité une consommation plutôt liée au travail. À une époque où les employeurs sont de plus en plus exigeant avec les travailleur·euses[6], certain·es recourent à ces drogues illégales pour être aussi bon·nes, voire meilleur·es, que leurs collègues, ou gérer le stress qu’impliquent des exigences de performance. Les autorités s’obstinent donc à pénaliser ceux qui tentent, certes à leur manière, de satisfaire à certaines normes très impératives de la société.

A cet égard, l’échec de la prohibition de l’alcool aux États-Unis peut servir d’exemple. Poussée par des groupes puritains, l’interdiction totale par le gouvernement américain de la fabrication, vente et consommation d’alcool a donné naissance à de multiples mafias, qui produisaient et écoulaient de l’alcool illégalement dans tout le pays et dans toutes les couches de la société. Cette politique prohibitionniste n’a fait qu’augmenter les problèmes sanitaires liés à l’alcool de mauvaise qualité et a fait exploser la corruption et la violence entre bandes rivales. Après treize longues années, le gouvernement fédéral américain a fait marche arrière, estimant plus sage d’encadrer cette consommation puisque des millions de citoyen·nes n’arrivaient pas à arrêter malgré la prohibition.

Combien de temps faudra-t-il encore avant que les États ne se rendent compte qu’ils sont les seuls à pouvoir changer le système qu’ils ont mis en place, qui engendre toujours plus de violences et fait toujours plus de victimes ?

 

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[1] Propos tenus par l’avocat anversois Walter Damen dans De Standaard, « Belgique. Violences liées au trafic de drogue : quelle est la part de responsabilité des consommateurs ? », 25 aout 2022.

[2] Déclaration du ministre des Finances Vincent Van Peteghem, « Décès d’une enfant lors d’une fusillade à Anvers: « Les consommateurs doivent se regarder dans le miroir », LN24, 10 janvier 2023.

[3] L’exemple d’Anvers montre bien que la « guerre à la drogue » crée de la violence puisque c’est suite au succès de l’enquête policière sur le réseau SKY ECC que la violence des trafiquants s’est déchaînée, probablement pour occuper le terrain.

[4] Idem, propos tenus par l’avocat anversois Walter Damen dans De Standaard.

[5] A la ligne d’écoute téléphonique (02 227 52 52), 506 personnes ont évoqué une consommation de cocaïne, soir dans 21% des appels. Du côté de la permanence électronique, les utilisateurs évoquent ce produit dans 31% des cas.

[6] Il suffit de penser au sort de employés de Delhaize, dont les magasins risquent de devenir franchisés, ce qui les obligerait à travailler plus tout en gagnant moins d’argent.

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Documentaire : Le refuge, chasser les dragons

« Vie de chien, vie de galérien. Hier, tu étais le roi et aujourd’hui, tu n’es plus que le bouffon du roi. » (Un usager de Tadam)

Sorti en 2021, cet excellent documentaire d’Alexandra Kandy-Longuet s’ouvre sur les conditions d’admission de Tadam ; une salle de consommation à moindre risque ouverte à Liège en 2018.

Un décor bleuté pour refléter l’ambiance du lieu.  Des usagers y consomment des stupéfiants en toute sécurité. Ils sont accompagnés par du personnel formé. Aucune drogue leur est fournie sur place. Ici, discrétion et écoute oblige, pas d’obligation de cure…

Tadam, c’est bien plus que de l’échange de seringues, des petits plateaux en inox qui s’entrechoquent avec ce bruit clinquant pour des trips bons ou mauvais. Des casiers comme au club de sport, pour mettre ses vêtements avant sa consommation.

C’est l’accompagnement d’un usager pour l’obtention d’un logement difficile d’accès quand on est à la rue. Un usager souvent pas rasé et les cheveux en bataille.  Un usager qui connaît drogue, séparation, perte d’emploi, drames familiaux…

Et puis, un autre usager se bat pour revoir son fils et suivre une formation. Ne pas être séparé de son enfant donnera souvent l’envie et la force de remonter la pente et dompter le « dragon ».

Aussi, les effets secondaires de la consommation de produits psychotropes. De la septicémie aux abcès provoquée par les injections. En réponse, Tadam offre une possibilité de recourir à l’inhalation des produits.

La découverte des péripéties de la mendicité avec ses horaires et ses conditions drastiques, restriction quant au lieu, au nombre de personnes autorisées à mendier à tel endroit et dans telle tranche horaire…

Tadam, c’est aussi le cadre de scènes ô symboliques de lavement de pieds et d’occasion de confidences. La vie dans la rue endommage aussi les pieds qui restent dans des chaussures trop longtemps détrempées…

En conclusion, quand le temps sera revenu de voler de ses propres ailes, Tadam sera toujours là en cas de besoin…

 

La salle de consommation à moindre risque de Bruxelles ouvrira ses portes dans quelques jours. Elle s’inscrit dans la même philosophie de travail que celle de Liège.

 

Liens et adresses utiles :

Le documentaire : Le refuge, chasser les dragons :

https://www.rtbf.be/auvio/detail_le-refuge-chasser-les-dragons?id=2836780&t=0

Tadam, la salle de consommation à moindre risque de Liège :

https://www.liege.be/fr/actualites/une-salle-de-consommation-a-moindre-risque-ouvre-a-liege

SCMR GATE, la salle de consommation à moindre risque qui ouvrira bientôt à Bruxelles :

http://fr.transitasbl.be/scmr-gate/

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Proposition de loi sur la protection prénatale : un incroyable retour en arrière

Protection prénatale - GrossesseUne proposition de loi portant sur le bien-être des enfants à naître a récemment été déposée au Parlement fédéral par Valérie Van Peel (N-VA) et John Crombez (SP.a). Dans les grandes lignes, son objectif est de protéger le fœtus des effets de la consommation de drogues de la part de la femme enceinte. L’intention semblerait bonne si elle n’était pas basée sur le fait d’imposer des décisions aux parents si on estime que leur comportement est dangereux pour l’enfant. Une fois encore, ce sont les consommateurs de drogues, légales et illégales, qui sont directement visés, renforçant encore un peu plus la marginalisation et la stigmatisation que leur usage subit déjà. Une proposition paternaliste et régressive qui pourrait avoir des conséquences néfastes aussi bien sur ceux que l’autorité veut contrôler, que sur ceux qu’elle vise à protéger.

Mise sous tutelle, enfermement, sevrage imposé et césariennes forcées, voilà le sort qui pourrait être réservé à ceux et celles qui, selon la justice, ne mettent pas au premier plan l’intérêt de leur futur enfant. Une notion particulièrement vague, puisque l’intérêt de l’enfant n’a été clairement défini nulle part dans cette proposition. Qu’est-ce qui empêcherait donc de dire que le mieux pour un bébé est de grandir dans une maison quatre façades et pas en ville ? Que les parents qui travaillent trop ne peuvent pas accorder à leur enfant le temps dont il a besoin ? Qu’il faut atteindre un certain niveau de vie pour avoir le droit de fonder une famille ? Que l’utilisation de la télé et d’internet et la consommation de café sont déconseillés ? Face à un tel manque de clarté, on est en droit de se demander sur base de quoi et par qui les critères à respecter seront établis.

Vers plus « d’invisibilisation »

Selon la proposition actuelle, un seul critère pouvant impacter le bien-être de l’enfant est explicitement énoncé : le fait que les parents consomment de l’alcool et/ou des drogues illégales. C’est particulièrement le cas pour la femme qui porte le futur bébé que la loi veut protéger. Les personnes qui accueillent et élèvent des enfants tout en faisant usage de psychotropes sont donc par défaut considérés comme moins aptes, sans prendre en compte aucune autre qualité ou défaut dans leur personnalité ou leur éducation. Une perception de l’autorité qui flirte avec les grands principes de l’hygiénisme (voir de l’eugénisme, si ce n’est que le terme renvoie à des pratiques et des idées d’un autre âge) : dans un environnement où le parent usager de drogue est perçu comme ayant un effet négatif sur l’enfant à naître, la suppression du problème (la consommation, ou purement et simplement les parents) le plus tôt possible entraine la disparition de l’effet dans l’optique que l’enfant soit au final de « meilleure qualité ».

Malheureusement ce genre de proposition n’est pas étonnante dans une société où la prohibition est la base de la politique drogue et en consommer est considéré comme une transgression majeure des normes sociales. Il faut néanmoins être complètement aveugle aux effets néfastes de la marginalisation des consommations de drogues pour vouloir continuer dans cette direction. Bien que l’inquiétude face au risque pour le développement du fœtus soit justifiée, l’approche répressive et menaçante ne fera que pousser les parents à « l’invisibilisation ». En effet, la stigmatisation poussera les parents consommateurs à ressentir de la honte et de la culpabilité. La peur de subir le regard désapprobateur de la société et les répercussions judiciaires auxquelles ils s’exposent en dissuadera plus d’un de parler de leur usage de drogues et les éloignera de l’accompagnement médical et psycho-social.

Les femmes particulièrement visées

Un problème encore plus fortement ancré chez les mères et les femmes enceintes qui ont peur d’être perçues comme incompétentes et irresponsables et auxquelles on retire la garde de l’enfant, comme expliqué dans notre article sur l’usage de drogues chez les femmes. Des craintes désormais renforcées ar cette proposition de loi qui appuie légalement leur stigmatisation. Menacées dans leur intégrité physique comme dans leur qualité de mère, elles seront sans doute encore plus nombreuses à éviter ou retarder le plus possible un suivi approprié ou des soins médicaux ou obstétriques pourtant cruciaux pour le bon déroulement de leur grossesse.

Au Brésil, aux États-Unis, en Irlande, au Royaume-Uni, en Italie et dans tous les autres pays où ce genre de règle existe, les exemples alarmants de leur application sont nombreux. Ainsi, dans certains de ces pays[1], une future mère peut être emmenée de force à l’hôpital pour une césarienne non consentie si un juge estime que c’est plus sûr pour l’enfant. Toujours dans ces contextes nationaux de nombreuses femmes se sont vue emprisonnées après qu’un problème ou un accident a mis fin à leur grossesse. Ces arguments ont aussi été régulièrement utilisés dans des pays comme l’Angleterre, où des cas de vols institutionnalisés d’enfants pour ensuite les faire adopter, ont été révélés[2]. Des dispositions qui, bien évidemment, affectent de manière disproportionnée les catégories sociales plus vulnérables[3].

Soutenir au lieu de punir

Il existe pourtant de bien meilleures solutions que cette loi répressive pour aider les parents et leurs futurs enfants à accéder à de meilleures conditions médicales, sociales et environnementales. À Infor-Drogues, nous estimons que la meilleure manière d’accompagner des (futurs) parents consommateurs, est de proposer un suivi complet prenant en compte le contexte dans lequel ils évoluent. Il ne faut pas oublier que chaque usage de drogues, illégales ou légales, est vécu par le consommateur comme une tentative de résolution d’un problème et/ou une réponse à un besoin. Un fait que l’arrivée d’un enfant ne saurait effacer comme par magie. Il est donc primordial d’approcher l’arrivée d’un enfant dans ce genre de situation en apportant un soutien adapté aux besoins particuliers de la famille dans son ensemble.

Dans certains services spécialisés[4], de nombreuses années de prises en charge progressistes ont montré qu’avec des méthodes adaptées et les bons outils, il est tout à fait possible pour ces parents de bien vivre l’arrivée d’un enfant sans enfreindre leurs libertés individuelles. Pour les partenaires consommant de l’alcool et des drogues, la grossesse est sans doute l’un des meilleurs moments pour mettre en place un réseau transversal de professionnels œuvrant dans la confiance et le non-jugement. Dans ce cadre il est primordial de se soucier des besoins et de respecter les choix de chacun, pas de leur imposer un changement drastique de mode de vie. Principe que parait ignorer la proposition de loi, qui choisit plutôt de voir tous les parents usagers comme un danger pour leurs (futurs) enfants.

L’inefficacité des approches basées sur l’obligation, la force et la peur est connue depuis bien longtemps. Mais comme souvent on n’hésite pas à vouloir impliquer la répression dans une problématique qui relève de la santé, et la justice pénale là où le civil est compétent. Au final, cette proposition de loi, si elle est adoptée, ne risque pas de venir en aide à grand monde, tant elle est déconnectée des réalités de terrain. Bien au contraire. Il fait par contre peu de doute qu’elle saura attirer un certain électorat. Des considérations bien futiles, quand on pense à tous ceux et celles qui risquent de subir des traitements inhumains et injustifiables et dont les droits et libertés sont une fois de plus mis en danger.

 

[1] La protection de « l’enfant à naître »: une mise sous tutelle des femmes enceintes / Marie-Hélène Lahaye,  RTBF.be, juin 2020.

[2] Les Enfants volés d’Angleterre / Film-Documentaire.fr, 2016.

[3] La Belgique avance une nouvelle proposition de loi inquiétante pour les droits des femmes / Marise Ghyselings, Moustique.be, 2020

[4] Guide concernant l’usage de substances psychoactives durant la grossesse / Anne Whittaker (vo), Nicolas Bonnet et Thomas Chihaoui (coordination scientifique vfr), RESPADD, 2013.

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Ce que le confinement nous dit des consommations de drogues

Le 15 mars dernierConfinement et consommations de drogues nous entrions dans une ère inédite, celle du confinement. La privation soudaine des liens sociaux que sont la famille, les amis, le travail et les loisirs allait-elle modifier les habitudes de consommations de drogues légales et illégales ?  Et si oui, de quelle manière ? Les premières observations disponibles concernant l’influence de ces changements sur les usages permettent d’émettre plusieurs constats.

Le contexte, c’est la clé

Alors qu’une hausse massive de la consommation d’alcool était attendue[1], les premiers résultats d’une étude menée par l’UCLouvain sont plus mesurés. Parmi les répondants, seule une personne sur quatre déclare boire plus d’alcool qu’avant le confinement (25%)[2]. Ils sont légèrement plus nombreux (29%) à avoir diminué leur consommation, et 46% disent n’avoir rien changé à leurs habitudes. Mais l’observation la plus frappante selon les responsables de l’enquête, c’est que ce qui influence plus fortement le fait de consommer c’est le contexte. Pour nous à Infor-Drogues, c’est loin d’être une surprise.

En effet, ce qui est pour nous déterminant, c’est le lien entre contexte de vie et motivations à consommer. Les motivations sont créées par ce contexte. Les nouvelles circonstances avec lesquelles nous vivons depuis le début du confinement en sont l’illustration parfaite. Les choses ont changé à une vitesse folle. Quasiment du jour au lendemain, toutes nos habitudes se sont vues bouleversées. Ces modifications et leur impact sont donc pour une fois clairement observables et mettent plus que jamais en avant l’influence directe du contexte sur la consommation des personnes.

Ainsi, toujours selon l’étude de l’UCLouvain, les motivations mises en lien avec une augmentation de la consommation sont principalement dues à des sentiments comme le stress et l’anxiété, qui peuvent être liés à la peur de la maladie ou l’incertitude professionnelle, mais aussi la perte de liens sociaux. Un isolement dont nous constatons nous aussi les effets puisqu’il est devenu un des sujets les plus évoqués dans nos écoutes téléphoniques. Plus qu’aborder la consommation elle-même, le dialogue permet alors de rompre la solitude et retrouver une certaine forme de lien social.

Mais ce changement de contexte dans les relations et les activités peut aussi avoir pour effet une diminution de la consommation. C’est par exemple vrai pour les étudiants qui, n’ayant plus la possibilité de faire la fête comme avant, se retrouvent à boire moins d’alcool que d’habitude[3]. Un constat qui est fait pour tous les usages qui s’effectuaient dans un contexte social ou festif, c’est-à-dire motivé par le contact avec d’autres personnes, qu’il s’agisse de famille, d’amis ou d’autres rassemblements plus larges. En l’absence de motivations à consommer pour être bien ensemble, l’usage diminue. Une logique qui s’applique à plusieurs substances, aussi bien légales qu’illégales puisque, toujours selon l’enquête de l’UCLouvain, la consommation de cigarettes, de cocaïne et de cannabis est également en diminution.

Outre la diminution des liens sociaux, cette période d’isolation a aussi un lourd impact sur les finances de nombreuses personnes. Un effet que nous percevons particulièrement chez les personnes qui nous contactent pour parler d’assuétude. Alors que certains de nos bénéficiaires présentent déjà un profil socialement et économiquement vulnérable, ils doivent désormais faire face à la diminution ou la disparition de leurs revenus ou revenus de substitutions, la perte de leurs droits sociaux, la difficulté d’accès à certains services d’accompagnement social ou de soins, au surendettement, et à bien d’autres difficultés apportées par la crise sanitaire actuelle. Un grand changement dans leur contexte financier de vie qui influence inévitablement leur motivation à consommer.

Confinement et sevrage, entre opportunité et angoisse

Notre service d’écoute téléphonique constate également une augmentation dans le nombre de contacts en lien avec le sevrage. Si nous insistons fortement sur le caractère unique de chaque appel et situation, nous pouvons néanmoins distinguer deux types de diminution ou d’arrêt. D’une part, le sevrage volontaire, qui peut même avoir été décidé avant la situation qu’on connait aujourd’hui. Cette dernière est alors parfois perçue comme une bonne occasion de mettre son usage en pause.

D’autre part, le sevrage involontaire, dont on peut observer plusieurs origines comme un accès moins facile aux produits ou l’augmentation des prix. D’un autre côté, les restrictions d’accès aux structures d’aides ou aux produits de substitution constituent une véritable difficulté. Une situation d’autant plus compliquée en ce moment, comme l’explique l’association Eurotox dans son guide de réductions des risques liés à la consommation et au Covid-19.

Que votre consommation ou celle d’un proche ait changé ou non dans cette période inédite que nous vivons, Infor-Drogues reste plus que jamais à votre écoute. N’hésitez donc pas à nous contacter pour toutes vos questions par téléphone au 02 227 52 52 du lundi au mercredi de 9h à 21h, le jeudi de 13h à 21h, le vendredi de 9 à 17h et le samedi de 10h à 14h, ou via notre e-permanence.

 

[1] Coronavirus en Belgique : le confinement risque de pousser à la consommation d’alcool / Thomas de Brouckère, Le Soir, mars 2020.

[2] Consommation d’alcool stable, voire en baisse / UCLouvain, avril 2020.

[3] Le confinement n’a pas fait de nous des alcooliques / A.F., C.D., Le Soir, avril 2020.

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